vendredi 9 juillet 2010

La chochotte est un Non-Shuar. -Chapitre troisième-

Laissez-nous maintenant vous présenter le peuple Shuar.Généralités, d'abord. Ils vivent dans la forêt amazonienne depuis toujours. Toujours, toujours. Avant même le déluge. Selon leurs légendes, le peuple serait né d'une femme ayant toujours vécu dans la jungle. La mujer de Amazonia. Elle est aujourd'hui leur emblème et une genre de déesse qu'ils vénèrent en vivant, eux aussi, dans le fin fond de la jungle.Le peuple Shuar est très fier. Nous avons eu la chance de vivre avec Don Miguel, le dit père de famille qui s'est fait un plaisir de vanter sa patrie et de nous éclairer sur les coutumes ancestrales et sur les traditions du peuple. Pour lui, le Shuar n'a qu'une parole. Il est invinscible de par sa force et sa persévérance et fini toujours par arriver à ses fins. Selon ses dires, le peuple Shuar serait le seul à avoir résister à la conquête espagnole. Non pas pour s'être retirés au plus profond de la forêt, mais plutôt pour avoir versé dans les eaux contrôlées par les espagnols un poison transparent quiles a tué en un rien de temps... À prendre et à laisser !

Voici un petit appercu des traditions que l'on nous a enseigné:

Nourriture: Caracha, Yuca (genre de navet ou de patate). Ils boivent aussi la Chicha 70 fois par jour. Cette boisson à base de Yuca fermentée qui ressemblent drôlement au liquide séminaire leur donne de la force pour passer à travers leur journée. Ce sont les femmes qui la préparent et qui la passent aux hommes dans un bol de bois spécialement fabriqué à cet effet- eux qui ne peuvent se lever pour le passer au voisin-. Cet boisson alcoolisée est aussi servie aux enfants en bas âge, d'où leur énergie inépuisable à nous courrir après et à répéter nos noms 300 000 fois la seconde.

Voyez ici Miguel qui prend un plaisir coupable à être fotographié en pleine action: dans un french langoureux avec la dite Caracha !!

Rituels: Malgré le fait que les parents sont évangélistes et que quelques membres de leur progéniture sont musulmans (???), ils ont convervés quelques coutumes de leurs ancestres et font honneur à la culture Shuar en les mettant en pratique de temps à autre. Premièrement, la médecine traditionnelle fait partie du quotidien: remèdes à bases de gingembres, de fleurs et de plantes de toutes sortes peuvent guérir le malade de ses coliques. Hors, dès qu'il est question de sang, c'est recto à l'hôpital. Deuxièment, ils utilisent plusieurs plantes pour se connecter avec les esprits et voir leur futur (en langage occidental:pour se droguer) ou encore pour se limper (se nettoyer, ou en langage occidental: vomir). Lors de notre séjour, ils se sont levés une fois à 2 heure du matin pour boire un remède spécial et pour vomir jusqu'à l'aube. Étrangement, ils prétendent se sentir plein d'énergie le jour d'après. Nous n'avons pas tenté l'expérience et nous sommes contenté du bruit pour en avoir une bonne idée.

Fait cocasse: Un beau matin,Pito nous a amené un très belle fleure, rose et grosse que nous avons, par réflexe, humée. L'un des adultes s'est alors retourné et nous l'a enlevé des mains en prétendant que nous pourrions tomber dans les pommes tellement la fleur avait des propriétés chamaniques. La humer était en fait un autre moyen de voir notre avenir et de vivre d'amour et d'eau fraîche avec l'espiritu!

Autrement, nous sommes allées visiter la Cascade, qui fait office de lieu sacré pour les Shuars. Pour y aller, l'un d'entre eux a du nous peindre le visage avec fruit rouge,l'Ipecnua en langage Shuar. Nul n'a droit de pénétrer dans l'enceinte de la Cascade sans ces dessins. Ce serait manquer de respect à l'Espiritu qui habite dan ses eaux. Les symboles sur le visage d'Audrey représentaient l'Anaconda (que l'on trouve d'ailleurs près de l'endroit où l'on vivait),soit la force de la Cascade. Les miens représentaient la mujer completa, soit la femme emblème de l'Amazonie dont j'ai parlé plus tôt.

Surnoms: Les Shuars prennent drôlement plaisir à se donner des surnoms.Surtout aux enfants. Hors, ces surnoms sont en vérité un peu méchants et font rire tout le monde autour, si bien qu'il fut pour nous aussi difficile de résister lorsque le père appelait la plus jeune fille Chancha Gorda, soit la grosse cochonne. Ce serait dû au fait qu'elle mange beaucoup trop de Yuca. Audrey et moi nous sommes donc forcées et avons procédé à notre intégration en l'appelant La grosse Cochonne toutes les fois qu'elle pleurait, qu'elle parlait ou qu'elle vivait. Un autre s'appelait Pito (piteux), puisque plus jeune, il chialait tout le temps. On surnommait le dernier Mishim (nain, en langage Shuar) puisqu'il était petit.Remarquez qu'à 4 ans, c'est quand même normal. Parler de Mishim est d'ailleurs le sujet favori des Shuars. Ils s'en donnent à coeur joie, s'exclaffant d'un rire franc à la seule prononciation du mot magique. Audrey et moi avons aussi été baptisés. Ipecnua, comme le fruit rouge, était le nom d'Audrey. Ipec pour les intimes. On m'appelait Séchanua, un oiseau coloré que l'on retrouve dans la jungle.

Traditions: La maison typique Shuar est toute de bois construite, avec un toit en feuille de palmier. Rien dans la maison. Absolument rien.Lorsqu'ils se réunissent dans une maison Shuar,c'est souvent suite à une Minga, un travail communautaire où les hommes se mettent à la tâchent pendant que les femmes préparent la Caracha et la Chicha.C'est suite à ces Mingas qu'ils dorment tous ensemble sur le sol. Nous avons eu la chance de vivre cette expérience juste avant de quitter. Nous avons marché 2 heures dans la chaleur suffocante de l'après pluie, sur un chemin bouetteux pour finalement arriver à la cabane, près du repère des Chimpanzés. Jamais nous n'avions vu un endroit si pauvre. Dans la maison, il y a fait un feu, un tas de maïs, un matela de camping sur lequel dormaientles 4 enfants et quelques vêtements accrochés sur les lattes de bois.Nous nous sentions à ce moment très loin de chez nous et avons eu les larmes aux yeux lorsque, dans la fumée épaisse du feu qui brûle 24h sur 24h, on nous a servi 2 Carachas.Nous étions faibles comme des Non-Shuars, grippées et victimes de diarrhés.Mais nous avons réussis à terminer nos assiettes en partageant avec les enfants qui, à la seule vue de leurs ventres boursoufflés, sont visiblement sous l'effet de la malnutrition. Ce soir là, après avoir attendu sur le bord de l'eau que Samuel et Don Miguel finissent de pêcher, de peur de rencontrer un serpent sur le chemin du retour (une morsure est fatidique. Une simple morsure de couleuvre peut tuer en quelques heures à peine.On nous avait bien avertis que l'on devait toutes les tuer avec un baton. Facile à dire), nous avons encore mangé la Caracha. Nous nous sommes finalement couchés directement sur le bois, collés contre Don Miguel qui était aussi maître du ronflement et de Fabian, l'enfant qui sucaient la gueule de la Caracha couché dans mon lit et qui recrachait les morceaux à côté de mon oreiller. Comme si j'avais besoin de rêver au poisson en plus !


La maison dans laquelle on dormait avec toute la famille...


Nous nous sommes réveillés le lendemain matin, ayant à peine dormis. Les sécrétions étranges d'Audrey nous ont servies de prétexte pour partir.Or,comme il est difficile d'employer les mots justes pour décrire son état sans faire la gaffe du siècle, nous avons prétendu qu'il y avait du sang dans ses selles, en se contentant de dire: ''Si, hay Sangre'' (soit: oui, il y a du sang), en revenant des toilettes, ou plutôt de la litière.

En tant que bon samaritin, Don Miguel a compris. Et pour être certain que nous aurions assez d'énergie pour se rendre jusqu'à l'hôpital de Macas, ils nous ont servis une autre Caracha !

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