lundi 1 novembre 2010

En sens contraire

Overdose de bruit. Dans ma tête, mes oreilles, dans mes bouchons. Overdose de béton. Plus rien n'a de sens et j'ai l'impression d'être attirée malgré moi vers l'Antartique. Le pôle magnétique a eu raison de moi. Inconsciemment. Overdose des voisins de chambre trop bruyants, des gens qui ne savent pas vivre, comme s'il vivaient tout seuls. Overdose des restos, de l'odeur de pisse, des becs vulgaires au passage. Je n'en peut plus de partir. Je n'en peut plus d'arriver. De repartir, et d'arriver encore. J'ai mal là où le voyage m'a donné un coup au coeur. J'ai mal au coeur, au coup de coeur. Tellement que ça me fait faire des mauvais jeux de mots. À bien y pense, c'est peut-être pas si nouveau...

J'imagine que j'ai besoin de changer d'air. Personne ne croirait cela possible, et je comprendrais pourquoi. C'en est presque ridicule compte tenu des circonstances. Mais même à des miles et des miles de chez moi, de tout ce qui m'est familier, malgré le temps qui passe à toute allure, même en changeant le cap comme on change de sous-vêtement, le vent souffle parfois en sens contraire.

On marche sur des terrains glissants, je veux dire, lorsqu'on se met en tête qu'il faut suivre le vent. Il y a les bonnes décisions desquelles on a tout le loisir d'être fières. Il y a les autres, les moins bonnes décisions, parfois prises malgré soi. Ces mauvaises décisions dont on ne ressentira jamais tous les effets, enfin, pas complètement. Ces décisions prises sur le vif, à reculons, à pile ou face, celles que l'on range vite dans les affaires classées pour éviter de se demander si l'on aurait mieux fait de changer le verdict du hasard. Si l'on aurait pas mieux fait d'arranger le hasard. Tout ne peut pas se tirer au sort, Marianne. J'ai là un grand deuil à faire.

Changer d'air, donc. Enfin, le silence me permet de penser. D'entendre, plutôt, ce à quoi je pense. Le vent de 6 heures dans mes oreilles. Le vent fait le ménage de ce qui se trouve entre les deux. Le vent fait de son mieux...
Le bruit rassurant du ruisseau qui coule depuis toujours et qui coulera encore toujours. ÇA, ça n'a rien d'éphémère. Enfin.
Je suis toute petite parmi ces arbres géants, ces montagnes comme toutes les autres et le silence qui prend toute la place. Je n'ai pour seule compagne celle qui parle aux oiseaux. Comme si c'était normal d'entretenir une conversation avec une rapace, même exotique. Comme si, le jour de ses 21 ans, on en arrivait finalement à les comprendre, les oiseaux. Ça a quelque chose de très humain, de vrai.

Ce soir, on dormira chez nous. Sous un toit imperméable, entre 4 murs de toile, un toit étoilé. Chez soi, au beau milieu de nulle part. Nullepart, le seul endroit que je connaisse où l'on peut être partout à la fois. Nullepart. Derrière nous les klaxons de la ville. Le gros beat du soir, le bourdonnement au petit matin. Les 10 milles visages inconnus. Les voix, les murmures anonymes des passants.

Devant moi, deux mouches s'accouplent. Elles copulent silencieusement, sans vouloir me déranger. Autour de moi, une horde de moustiques, seuls à ne pas se plier aux règles de la nature. L'hyperactivité du calme-plat. Je décide de me mettre à la collection des piqûres. Mon postérieur en compte déjà à lui seul une vingtaine. J'ai de quoi être fière. Dormir la joue gauche sur le pointu d'une roche. Respirer le grand air, inhaler une mouche. Deux, sûrement. Aujourd'hui, je suis crasse. Pas salie d'une de ces crasses urbaines, d'un jus de poubelle ou d'une vieille gomme collée fermement sous le pied. Je suis crasse de terre, de parasites de Rio. Crasse d'avoir marché pieds nus n'importe où, de la fumée du feu de bois, de la poussière éparpillée par la brise, des miettes de biscotte dans toutes les craques de mon corps. Procédez par élimination.

Et malgré tout, lanaturelesilenceletempsleciellatenteleriviere, le coeur n'y est pas. Pas plus qu'il y a deux jours. Sûrement pas moins que dans une semaine. Je devrais être ailleurs.
Je n'ai pas encore changé assez d'air, visiblement.
Aujourd'hui, je me suis crachée dessus 2 fois. Je vous l'ai déjà dit, le vent souffle parfois en sens contraire.

M.

4 commentaires:

  1. Une petite pose s'impose!!!!
    Vous avez fait un bon choix en vous offrant une tente qui vous donne toute la liberté nécessaire avant de vous réengager dans d'autres expériences communautaires. Vous avez raison de faire le point sur ce que vous avez vécu et sur ce que vous voulez vivre. Peut-être que c'est le temps de vous reposer et de penser à vous et de vous gâter aussi avec des petites riens qui semblent du grand luxe!

    Je vous souhaite beaucoup de lucidité et de courage pour regarder devant vous et choisir le chemin que vous voulez suivre pour répondre à vos aspirations.

    Gros bisous

    Claude

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  2. Que de spleen... Autour du feu en camping pour remonter le moral il y a toujours la chanson de Ferland « envoye a maison » !
    El Padre de Mariana...

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  3. Une pause va vous faire du bien, pour repartir sur du positif. c'est en se retrouvant dans son petit monde a soi qu'on retrouve le plaisir de découvrir.

    Faite attention à votre moral

    Francis xx

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  4. Excellente décision, le camping!!!!

    Ça va vous donner genre style comme tellement plus d'autonomie!

    Y que vive Argentina!!!

    Tonito

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